Bruno Colmant

Bruno Colmant

Professeur d'économie à l'université. Membre de l'Académie royale de Belgique. Stratège. Écrivain. Conférencier.

Des temps indécis

09 juillet 2016

Chaque semaine, le montant des obligations souveraines qui présentent un taux d’intérêt négatif s’amplifie. Il atteint presque 12.000 milliards de dollars, soit l’équivalent de 15 % du PIB mondial. Partout, les taux d’intérêt baissent ou sont infléchis par les banques centrales, malgré des injections monétaires sans précédent. Cette situation est à proprement parler incroyable : les dettes publiques atteignent un niveau inconnu depuis des temps préhistoriques tandis que les taux d’intérêt sont au plus bas depuis leur conceptualisation.

Les injections monétaires émanant des banques centrales se substituent progressivement aux circuits monétaires bancaires tandis que l’inflation reste à un niveau millimétrique.

Certains voient une certaine stabilité dans cette situation qu’ils caractérisent de stagnation séculaire. Intuitivement, j’en serais fort étonné car j’ai peine à me convaincre qu’un symbole, à savoir la monnaie (et sa transcription étatique sous forme de dettes publiques) crée sa propre dynamique d’appauvrissement (au travers de taux d’intérêt négatifs) alors que sa formulation conventionnelle est justement de permettre la mesure d’accroissement du capital au travers du temps (je vois le taux d’intérêt comme une mesure dégradée et simplifiée de la valeur du temps)

Exprimé de manière différente (et je suis conscient que mon propos puisse être sibyllin), je ne crois pas que la dynamique du symbole nous échappe dans son propre appauvrissement.  Je crois donc à un retour à la « normale » des paramètres économiques sous leur forme traditionnelle, à savoir que les injections monétaires se traduiront tôt ou tard sous forme d’inflation et que les taux d’intérêt augmenteront en fonction des anticipations d’inflation.

Bien sûr, une des situations qui pourrait entretenir le caractère d’auto-extinction de la monnaie sous forme de taux d’intérêt négatif serait l’immersion dans un contexte déflationniste profond et persistant couplé à une étatisation plus ou moins généralisée de l’économie.

Ce dernier scénario me semble peu probable. Mais quelque chose m’échappe peut-être. Merci de vos commentaires, toujours attentivement lus.

Bruno Colmant

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