2015 : En quête de croissance…

17 décembre 2014

Une inflation encore toujours à la baisse, une croissance un peu plus solide et une politique monétaire souple, tels seront les facteurs déterminants du premier semestre 2015, soulignent les spécialistes d’ING. Dans ce contexte, les actions restent l’instrument de placement le plus intéressant et les obligations se rapprochent inexorablement de la fin d’un marché haussier vieux de trois décennies.

Peter Vanden Houte, Chief Economist, et Thierry Masset, Chief Investment Officer d’ING Belgique se livrent à une analyse de la situation et de ce qui nous attend en ce début de 2015.
Le PIB de la zone euro demeure plus de 2 % inférieur à ce qu’il était à la fin 2007. La zone euro semble donc ne pas encore avoir digéré la crise économique qui a éclaté il y a sept ans déjà. A l’instar de ce qu’a connu le Japon, l’Europe semble s’enfoncer dans une « stagnation séculaire » caractérisée par une croissance anémique, des pressions déflationnistes et des taux d’intérêt bas. Mais la vive contraction des prix de l’or noir devrait soulager quelque peu les pays importateurs de pétrole et atténuer le risque d’une rechute en récession.
D’autant que les Etats-Unis renouent avec un rythme de croissance plus soutenu, mais parfois au prix d’une politique d’octroi de crédits trop laxiste. Quant à la Chine, elle continue de « digérer » son changement de modèle industriel orienté davantage vers la croissance de la consommation domestique que des exportations. Il est probable que les autorités chinoises devront adopter en 2015 de nouvelles mesures de stimulation afin d’endiguer le ralentissement économique en cours. Pour ce qui est des autres économies émergentes, fortement dépendantes des exportations de matières premières, elles seront confrontées à une expansion plus faible.
La BCE a-t-elle un rôle essentiel à jouer?
Peter Vanden Houte : « La faiblesse persistante de la croissance dans la zone euro et les divergences croissantes entre le Nord et le Sud constituent un risque pour la stabilité de l’Union monétaire. Raison pour laquelle la Commission européenne met désormais moins l’accent sur l’austérité. Le nouveau plan d’investissements proposé apparaît comme trop peu ambitieux pour constituer une réelle stimulation budgétaire. Finalement, la tâche consistant à maintenir la croissance européenne sur les rails incombe toujours essentiellement à la BCE.
La volonté de la BCE de gonfler son bilan à concurrence de 1.000 milliards d’euros devrait probablement se concrétiser au premier semestre 2015 par l’achat d’obligations souveraines. Cela devrait non seulement renforcer la dépréciation de l’euro, mais aussi pousser les taux à court terme encore plus bas, voire même en territoire négatif. Même si cela ne signifie pas automatiquement qu’un taux négatif sera d’application pour les dépôts d’épargne, la baisse des rendements sur les livrets d’épargne n’est donc pas finie. Quant aux taux à long terme, qui baissent pour le moment sous l’effet des anticipations d’achats d’obligations d’Etat par la BCE, ils pourraient se tendre légèrement l’année prochaine. « L’expérience US tend en effet à démontrer que les marchés financiers préfèrent les actifs à risques plutôt que les emprunts d’Etat lorsque la banque centrale décide de recourir à un assouplissement monétaire agressif . »
Dans l’ensemble, le premier semestre de 2015 devrait donc être caractérisé par une inflation faible, une croissance mondiale légèrement plus vigoureuse et une politique monétaire encore très accommodante. Dans un tel contexte, les principaux risques pesant sur ce scénario sont un ralentissement plus fort que prévu en Chine et une recrudescence des tensions géopolitiques.
La politique monétaire divergente et un dollar plus fort font-ils le jeu des actions européennes et japonaises ?
Malgré l’absence d’une réelle dynamique de croissance globale et les faibles marges de manœuvre des pouvoirs publics, Thierry Masset continue à mettre l’accent sur les actions (par rapport aux obligations et au cash), même si elles auront vraisemblablement du mal à rééditer leurs exploits des deux dernières années. « Après avoir dégagé un rendement annuel total de près de 15 % (en euros) en 2013 et 2014, les actions mondiales devront sans doute se contenter l’année prochaine d’un rendement à un chiffre. Pour dénicher des rendements plus importants, il faudra donc, adopter une stratégie plus réactive et savoir profiter des changements de tendance. A cet égard, l’écart grandissant entre, d’une part, des politiques monétaires plus expansionnistes au Japon et dans la zone euro et, d’autre part, des Etats-Unis où le banquier central (la Fed) a cessé ses injections de liquidités, devrait se traduire par une poursuite de la dépréciation de l’euro et du yen face au dollar US. » Ce « rerating » du billet vert incite le CIO à mettre en avant les actions européennes et japonaises (mais à condition de couvrir le risque de change sur le yen).
Les orientations monétaires offrent-elles des opportunités de marché ?
Thierry Masset : « La dépréciation de l’euro stimulera la croissance des bénéfices des entreprises continentales : chaque baisse de l’euro de 10 % tend à renforcer de 10 % leurs bénéfices par action, un peu plus de la moitié des ventes des entreprises européennes étant réalisées en dehors de la zone euro. L’adoption d’une stratégie monétaire plus expansionniste dans la zone euro est indéniablement positive pour les actions de la périphérie européenne. Sur le plan sectoriel, les banques européennes semblent, grâce à une base bilantaire plus solide et des valorisations attractives, bien positionnées pour profiter d’une politique monétaire plus accommodante. La pression baissière s’exerçant sur leurs cours devrait s’inverser à mesure que la Banque centrale européenne (BCE) augmentera ses injections de liquidités. Les actions nippones devraient, elles aussi, tirer profit tant de leur valorisation attractive que d’un retour de l’inflation et de la croissance économique. A fortiori lorsque l’on sait que la Banque du Japon (BoJ) devrait continuer de se montrer ultra-accommodante, que les fonds de pensions japonais renforcent leur détention d’actions domestiques et que s’accroissent les pressions baissières sur le yen. »
Qu’en est-il des obligations ?
Thierry Masset : « Sur le marché des obligations, les emprunts émis par les Etats et les entreprises sont probablement arrivés au terme de trois décennies de marché haussier, mais cela ne signifie pas pour autant qu’il faille s’attendre à un krach. Compte tenu du potentiel d’assouplissement monétaire de la BCE, il est vraisemblable que l’écart de rendement entre les obligations souveraines de la périphérie (l’Espagne en tête) et celles du noyau dur européen continuera à se resserrer. Par contre, je reste méfiant à l’égard des emprunts d’entreprises à haut rendement (« high yield »), dont les primes de risque (soit le surplus de rendement par rapport aux obligations sans risque) ont renoué avec leurs plus bas niveaux historiques. Leurs valorisations me paraissent désormais excessives, surtout en comparaison des actions. »



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