Bruno Colmant

Bruno Colmant

Professeur d'économie à l'université. Membre de l'Académie royale de Belgique. Stratège. Écrivain. Conférencier.

Austérité grecque : après la gauche, les colonels ?

27 décembre 2014

Depuis le début de la crise de l’euro, un infranchissable fossé s’est creusé entre les pays du Nord, économiquement homogènes, et les pays du Sud, géographiquement dispersés et auxquels on a imposé des plans de rigueur d’autant plus insupportables que ces pays présentent une faiblesse économique préalable. L’euro est d’ailleurs devenu une monnaie trop forte et donc inadaptée pour des pays qui ajustaient leurs économies au travers de dévaluations répétitives. Aujourd’hui, l’Espagne et la Grèce sont proches de choix politiques importants.


Deux partis politiques, chacun d’inclinaison à gauche, vont probablement jouer un rôle important : il s’agit de Syriza en Grèce et de Podemos (parti qui constitue le relais politique du mouvement des indignados) en Espagne. Les chemins législatifs de ces deux partis seront différents, mais chacun exige un relâchement de l’austérité, une révocation ou une révision de certains Traités, voire une annulation de la dette, en ce qui concerne la Grèce.
Bien sûr, l’avenir de ces formations est incertain. Il est possible qu’elles ne soient que l’écume d’un éphémère rejet politique, comme le fut le mouvement de l’italien Beppe Grillo.
Pourtant, si ces partis émergent, en représentation d’un vote démocratique, ce sera une fissure pour la zone euro qui est bâtie sur l’homogénéité et l’alignement des politiques monétaires et budgétaire. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il y a une politique monétaire monolithique de la BCE et que les Etats-membres de la zone euro ont choisi d’aligner leurs finances publiques sur un Pacte de Stabilité, qui exige un uniforme retour à l’équilibre budgétaire et un désendettement public. Si un pays s’écartait du rang, les conséquences seraient imprévisibles, tant en termes de gravité socio-économiques que de politiques monétaire. Incontestablement, son rating chuterait et ses possibilités de refinancement auprès de la BCE s’effondreraient, en même temps que son accès au marché des capitaux. Les taux d’intérêt monteraient, d’autant plus qu’un défaut ou un rééchelonnement de dettes publiques entrainerait un séisme financier.

D’autres pays s’interrogeraient incidemment sur le bien-fondé de leur politique budgétaire. Si l’Espagne traverse une convulsion politique de rejet de l’austérité, comment imaginer que le Portugal ne soit pas secoué ? Mais quelle que soit la probabilité d’émergence de Syriza et de Podemos, leur réalité rappelle non seulement la prédominance du choix démocratique mais aussi l’hypothèse implicite de l’euro d’une orientation politique homogène pour ses 18 Etats-membres.

La question est donc de savoir comment concilier l’appartenance à l’euro et une orientation divergente de celle de la majorité de ses Etats-membres.
Cette question de démocratie est importante et devrait interpeller le fonctionnement des institutions européennes, déjà balayées par une vague d’euroscepticisme lors des dernières élections européennes.

Bien sûr, d’aucuns argumenteront qu’après la gauche, il peut y avoir les colonels comme Papadhópoulos dana la Grèce de 1967. Cela relève bien sûr des manuels d’histoire. Mais l’avenir est tellement incertain…

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