Les nouveaux cauchemars de la BCE !

28 août 2017

Bruno Colmant
Alors que les grands argentiers de notre monde se réunissent à Jackson Hole (le trou de Jackson, qui était apparemment un trappeur de castors) dans le Wyoming, nous assistons à l’impuissance des européens en matière monétaire. En effet, après des années d’attentisme et de rigueur budgétaire et monétaire, défendue avec force par Mario Draghi…à Jackson Hole en 2013 et 2014, les autorités monétaires européennes (BCE) décidèrent de faire tourner la planche à billets pour relancer l’inflation. Ce fut un échec puisque le taux d’inflation oscille toujours autour d’un pourcent, soit la moitié de ce qui est souhaitable. C’est incidemment l’illustration que d’autres forces, comme le vieillissement de la population, contrarient cette inflation. Ceci étant, nous avons évité la déflation, dont les risques furent très tardivement avoués par la BCE.

En tout état de cause, la création monétaire n’avait pas pour but premier de susciter de l’inflation, mais plutôt d’affaiblir l’euro et surtout de refinancer la dette publique des Etats de la zone euro. Qu’on y pense : à ce jour, près d’un tiers de la dette publique allemande et portugaise sont logés dans les actifs de la BCE. Cela pose incidemment la question de savoir comment les Etats pourront financer la croissance de leurs dettes lorsque la BCE mettra inéluctablement fin à sa création monétaire.
Mais aujourd’hui, la BCE fait face à un autre problème. En effet, le dollar se déprécie…ce qui conduit à renforcer l’euro. C’est une mauvaise nouvelle pour les exportateurs européens. Est-ce un hasard ? Pas du tout : les Etats-Unis émettent la devise de réserve mondiale. Elle doit donc être faible pour justifier ce statut. Et, c’est connu depuis 1971, les Etats-Unis exportent leur inflation au travers d’une devise dépréciée. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la Federal Reserve va probablement retarder les hausses de taux d’intérêt annoncées au début de l’année, malgré une situation de plein emploi.
Bientôt, la BCE va devoir faire face, de nouveau, à ses cauchemars : une inflation millimétrique dans des économies âgées et sclérosées, des dettes publiques que seule l’épargne domestique va pouvoir financer, un euro trop fort et la fin annoncée de son soutien monétaire.

 L’auteur, Bruno Colmant, est Head of Macro Research chez Banque Degroof Petercam.

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