La Belgique adopte enfin la directive européenne sur la dénonciation des dysfonctionnements.

06 février 2023
Banque de connaissances

Comme de nombreux autres États membres de l’UE, la Belgique n’a pas respecté le délai initial de transposition de la directive européenne sur la dénonciation et le gouvernement est finalement parvenu à un accord préliminaire sur un projet de loi en février 2022. Celui-ci a été adopté fin novembre 2022, inaugurant une nouvelle ère pour les lanceurs d’alerte belges et apportant des changements profonds pour les entreprises.

L’Union européenne a dû faire face à une mosaïque de lois sur la protection des dénonciateurs dans les différents États membres, dont la portée varie considérablement, créant ainsi un paysage juridique confus. La directive européenne sur la protection des dénonciateurs a pour but d’introduire de nouvelles mesures radicales et de faire évoluer l’Union vers une norme de protection unique et complète.

L’une des principales caractéristiques de la nouvelle législation est l’obligation pour tous les employeurs des secteurs privé et public comptant au moins 250 salariés de mettre en place un système d’alerte, les petites organisations employant entre 50 et 249 personnes bénéficiant d’un délai supplémentaire pour mener à bien ce processus. Elle exige également un dialogue régulier entre l’organisation et le dénonciateur, tandis que les mesures de rétorsion à l’encontre du plaignant sont interdites.

Avant la transposition, la Belgique ne disposait pas d’un cadre juridique complet pour protéger les dénonciateurs. Deux procédures existaient dans le secteur privé concernant les marchés financiers et le blanchiment d’argent, tandis qu’une loi de septembre 2013 offrait une protection aux dénonciateurs travaillant pour les gouvernements administratifs fédéraux. La nouvelle loi belge s’aligne étroitement sur le contenu de la directive, mais elle l’élargit également en se concentrant sur la fraude fiscale et sociale.

Le champ d’application de la nouvelle loi belge
Les nouvelles mesures visent à protéger les dénonciateurs qui signalent des violations dans un certain nombre de domaines du droit communautaire, notamment les marchés publics, les services financiers, la sécurité des transports, la protection des consommateurs, la sécurité des denrées alimentaires et des aliments pour animaux, la sécurité des produits ainsi que la radioprotection et la sûreté nucléaire.

Elle ne s’applique pas seulement aux employés mais à toutes les personnes qui ont obtenu des informations dans un contexte professionnel. Cela inclut les indépendants, les anciens employés, les stagiaires et les prestataires de services.

Les entreprises de moins de 250 employés peuvent mettre en commun leurs ressources pour recevoir des rapports et faciliter les enquêtes, mais cela ne doit pas avoir d’incidence sur les exigences de la loi dans des domaines tels que la confidentialité et le dialogue régulier avec le dénonciateur.

L’obligation de disposer de canaux de signalement
La nouvelle loi belge, qui se traduit par la « loi sur la protection des dénonciateurs d’infractions au droit de l’Union ou au droit national découvertes au sein d’une entité juridique du secteur privé », prévoit trois canaux de signalement différents :

  • Un canal interne au sein d’une entreprise ou d’une organisation.
  • Un canal externe mis en place par le gouvernement.
  • La divulgation publique, par exemple par la presse.

Bien que le recours aux canaux internes soit encouragé, les dénonciateurs sont libres d’utiliser le canal qu’ils jugent le plus approprié pour leur plainte. Les entreprises opérant en Belgique et comptant 250 employés ou plus sont tenues de mettre en place un canal de signalement interne sûr, impartial et confidentiel à partir du 15 février 2023. Les organisations fournissant des services économiques spécifiques et financiers doivent prendre cette mesure dès qu’elles emploient une personne. Pour les entreprises comptant entre 50 et 249 employés, le délai de mise en œuvre des canaux de signalement est fixé au 17 décembre 2023.

La législation impose aux organisations de désigner un responsable des rapports, qui peut être une personne de l’organisation ou un prestataire externe spécialisé. Les rapports peuvent être soumis par écrit, par téléphone ou en personne. Le personnel qui traite les données de dénonciation doit le faire en toute confidentialité.

Dans les organisations comptant 250 employés ou plus, des rapports anonymes peuvent être déposés et doivent être traités. Un rapport doit faire l’objet d’un accusé de réception dans un délai de sept jours calendaires et le dénonciateur doit être informé de son résultat dans un délai de trois mois.

Le Médiateur fédéral a été désigné comme l’organe de coordination des canaux de signalement externes. Dès réception du rapport d’un dénonciateur, le Médiateur le transmet à l’organisme compétent en la matière ou au secteur d’activité concerné, comme l’Autorité de protection des données ou l’Autorité des services et marchés financiers. Le signalement peut également être effectué par le biais d’une divulgation publique si les canaux internes et externes n’aboutissent pas à une action appropriée ou s’il existe une menace immédiate pour l’intérêt public.

Protection contre les représailles et les sanctions
La nouvelle loi belge prévoit une protection contre les représailles et la menace de représailles pour toutes les personnes qui utilisent les trois canaux de signalement. La définition des représailles est large et prend en compte la suspension et le licenciement, la modification des conditions d’emploi, la rétrogradation, le refus d’une promotion, l’inscription sur une liste noire et l’intimidation. Afin de se prémunir contre tout signalement potentiellement malveillant ou frivole, le dénonciateur doit avoir des motifs raisonnables de croire que sa plainte est vraie.

Une personne qui a subi des représailles a droit à une indemnisation allant de 18 à 26 semaines de salaire ou à une indemnisation égale aux dommages réels si elle n’est pas salariée. La loi prévoit également un renversement de la charge de la preuve, ce qui signifie que l’employeur devra prouver que tout désavantage accordé au dénonciateur était justifié et non lié à la dénonciation.

Des sanctions sévères sont également prévues en cas de non-respect de la législation et les employeurs sont passibles d’une peine de prison allant de six mois à trois ans. Pour les personnes morales, cela peut se traduire par une amende comprise entre 24 000 et 576 000 euros. La non-conformité peut prendre la forme d’une entrave (ou d’une tentative d’entrave) à un signalement, de l’engagement d’une procédure vexatoire contre un dénonciateur, de représailles ou de la violation de la confidentialité.

Résumé
La route a été longue, mais la Belgique a finalement franchi la ligne d’arrivée de son processus de transposition. Fin 2022, l’Allemagne, la Grèce, l’Italie et la Roumanie ont rejoint Bruxelles pour mettre en œuvre une nouvelle législation complète sur la protection des lanceurs d’alerte. Malgré le retard, la Belgique peut être particulièrement fière de ses efforts, car ils vont au-delà des exigences de la directive européenne sur la dénonciation.

Source: Niall McCarthy
Rédacteur de contenu | Groupe EQS
Niall est rédacteur de contenu au sein du groupe EQS. Originaire d’Irlande, il a travaillé auparavant comme journaliste, notamment pour rendre compte des grandes tendances de la corruption dans le monde.

 



Laissez une réponse

Votre adresse email ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués *