La Chine sur la voie du progrès en matière d’investissement responsable, malgré des contradictions

26 octobre 2021

Jess Williams et Jin Xu.

La Chine présente un double visage : leader mondial du développement d’énergies renouvelables ayant installé plus du double de la capacité en gigawatts (GW) de son concurrent le plus proche en termes de production d’énergie solaire et éolienne ces dix dernières années (figure 1), le pays est aussi celui qui a le plus renforcé ses capacités de production de charbon sur la même période, quasiment quatre fois plus que l’Inde. Le gouvernement chinois a dévoilé son intention de réduire ses émissions de charbon à partir de la fin du plan quinquennal actuel qui s’achève en 2025, mais de nouvelles usines à charbon d’une durée de vie de 40 ans sont difficilement compatibles avec un objectif de carbo-neutralité d’ici 2060. La Chine est un pays d’énormes progrès et de multiples opportunités, mais également de contradictions.

En valeur absolue, la Chine est le pays qui contribue le plus aux émissions mondiales de gaz à effet de serre.1 Toutefois, cela tient principalement à sa taille. En effet, si l’on considère le volume d’émissions par personne, celui-ci est nettement inférieur à celui des Etats-Unis et quasiment semblable à celui de l’UE. La différence majeure réside cependant dans le fait qu’après plus d’un siècle d’émissions en hausse, l’UE a désormais adopté une trajectoire baissière, ce qui n’est pas le cas de la Chine (figure 2). Autre élément à prendre en compte au sujet des niveaux d’émissions par pays : ceux-ci ne concernent que les rejets issus des activités de production. Autrement dit, les émissions générées par la production de biens de fabrication chinoise et destinés à la consommation dans l’UE et aux Etats-Unis sont comptabilisées dans l’empreinte carbone de la Chine. Si l’on s’intéressait aux émissions issues de la consommation par habitant, la Chine serait certainement bien meilleure élève que l’UE, les Etats- Unis et le Royaume-Uni.

Compte tenu des nouveaux objectifs zéro émissions nettes de la Chine et de sa position actuellement dominante dans le domaine des énergies renouvelables (70% de la production mondiale de panneaux solaires,2 la moitié de celle de véhicules électriques,3 et une grande partie de nombreux matériaux à la base des technologies de batteries4), rien d’étonnant à ce que les investisseurs s’intéressent de plus près au marché chinois des énergies renouvelables. Cet intérêt accru, notamment de la part des investisseurs sensibles aux enjeux ESG, conduit les entreprises à consacrer plus d’efforts aux informations qu’elles communiquent en matière de durabilité. De nos jours, le recours au travail forcé dans les chaînes d’approvisionnement est un facteur de risque qui retient particulièrement l’attention.

Une feuille de route plus détaillée pour la décarbonation devrait être publiée aux alentours de fin 2021. Celle-ci pourrait résoudre plusieurs des casse-têtes que connaît la Chine dans sa relation au charbon et comportera probablement trois axes prioritaires : la tarification du carbone, la finance verte et les investissements dans les technologies. Ces thèmes ont le potentiel de fournir un élan supplémentaire à un scénario déjà haussier.

La taille de marché de cette opportunité est considérable. Selon l’IRENA, l’Agence internationale des énergies renouvelables, en 2050, 8.519 GW de capacités de production d’énergie solaire seront nécessaires pour respecter le scénario de réchauffement climatique inférieur à 2 °C visé par l’Accord de Paris – soit 18 fois plus qu’en 2018.5 Il est prévu que l’Asie, et plus spécifiquement la Chine, représente plus de 50% du total des capacités installées de production d’énergie solaire, contre 20% en Amérique du Nord et 10% en Europe.6 Les prévisions relatives à l’énergie éolienne terrestre sont similaires, tablant sur une capacité nécessaire de 5.044 GW en 2050, soit 9 fois plus que ce qui a été installé en 2018. Plus de 50% de ces capacités se situeraient également en Asie, selon l’IRENA.7 Au regard des annonces récentes, qui reflètent un changement marqué dans l’importance accordée à la transition énergétique, de l’amélioration des normes d’information et du nombre considérable d’opportunités, nous pensons que le marché chinois mérite qu’on y prête attention. Toutefois, et c’est important pour les investisseurs ESG internationaux, cet intérêt sera conditionné à l’assurance que les chaînes d’approvisionnement ne comportent pas de violations des droits humains dans la communauté des Ouïghours au Xinjiang.

Source :

1 https://www.investopedia.com/articles/ investing/092915/5-countries-produce-most- carbon-dioxide-co2.asp
2 https://news.energysage.com/should-i-use- chinese-solar-panels-for-my-solar-installation/
3 https://theicct.org/blog/staff/china-new-energy- vehicles-jan2021
4 https://about.bnef.com/blog/china-dominates- the-lithium-ion-battery-supply-chain-but-europe-is- on-the-rise/
5 https://ieefa.org/irena-solar-generation-to- account-for-13-of-global-total-by-2030/
6 https://www.smart-energy.com/renewable-energy/ solar-power-to-cover-a-quarter-of-global-power- by-2050/
7 IRENA, Future of Wind: Deployment, investment, technology, grid integration and socio-economic aspects, octobre 2019.

Par Jess Williams, Portfolio Analyst, Responsible Investment & Jin Xu, Portfolio Manager Columbia Threadneedle Investments. 



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