Le chiffre du mois : 90

13 janvier 2022

90% comme la réduction du délai de développement d’un vaccin permis grâce à une approche digitale. Comment l’Intelligence Artificielle et le Machine Learning (AI/ML) révolutionnent le processus de développement et de fabrication des médicaments.

Les bénéfices multiples de l’AI/ML dans le développement de médicaments. 

Seuls 12% des médicaments qui rentrent en essais cliniques aboutissent à des lancements commerciaux. Le temps de développement moyen d’un médicament sur tous ses cycles est en moyenne de 8 ans. L’industrie pharmaceutique s’est donc toujours structurée autour de cycles longs et de retours sur capitaux employés limités par des taux de succès faibles dans les phases de développement. Et pourtant, nous pensons que l’Intelligence Artificielle et le Machine Learning vont faire rentrer cette industrie dans une nouvelle ère. Trois types de bénéfices de l’AI/ML sont d’ores et déjà identifiables : 1) l’identification de thérapies innovantes ; 2) la réduction des délais nécessaires au développement des médicaments ; 3) l’augmentation de la probabilité de succès sur les molécules en phase d’essais cliniques. En particulier, les algorithmes de Machine Learning vont apporter des bénéfices majeurs dans : 1) la définition du bon dosage de la molécule testée pour atteindre l’optimum dans le couple « efficacité vs toxicité » ; 2) la constitution de cohortes de patients pour les essais cliniques qui réunissent les caractéristiques (phénotypes et génotypes) souhaitées.

Plus facile de naître « plateforme digitalisée » que de le devenir…

Fort de ces constats, les dix plus grands groupes pharmaceutiques mondiaux ont à l’unisson procédé à des petites acquisitions stratégiques de start-up de l’intelligence artificielle. Ces pépites digitalisées sont venues se greffer à des workflows de R&D qui s’étaient construits depuis des décennies en mode « analogique » avec, sans surprise, des succès d’intégration assez inégaux. En effet, ces grands groupes pharmaceutiques se sont heurtés aux obstacles suivants : 1) le manque de connaissance en techniques de Machine Learning chez les développeurs de médicaments seniors ; 2) des pertes de vélocité importantes dans le processus de développement liées au fait que des pans entiers de la chaîne sont encore en analogique (contrairement aux sociétés 100% digitalisées).

Il en résulte que les réussites les plus fortes en matière d’usage de l’intelligence artificielle dans le développement de médicaments se trouvent aujourd’hui dans des acteurs qui se sont construits dès le premier jour sur des modèles de développement complètement digitalisés à base d’intelligence artificielle et de ses dérivés. L’exemple le plus célèbre de cette stratégie est aujourd’hui Moderna compte tenu de sa percée dans le vaccin Covid (mRNA 1273) et de la création de valeur économique et boursière qui en a résulté en peu d’années. Il existe également plusieurs autres sociétés cotées et privés qui placent l’intelligence artificielle au cœur de leur stratégie. Parmi elles nous pouvons citer : 1) Recursion Pharmaceuticals qui va appliquer des algorithmes de Machine Learning sur des séries de données biologiques et chimiques propriétaires à des fins de développement de nouvelles thérapies ; 2) Kronos Bio qui va utiliser des modèles computationnels très élaborés sur sa plateforme pour tenter de s’attaquer à des cibles cancéreuses qui avaient été jusqu’alors résistantes à toute forme de traitement.

Moderna offre l’exemple le plus abouti à ce jour

« Nous avons développé un vaccin Covid en deux mois, soit une réduction d’environ 90% du délai nécessaire au développement d’un vaccin qui est en moyenne de 20 mois » telle fut la manière dont Stéphane Bancel relate tout le processus qui a démarré par l’identification d’un SARS Coronavirus jusqu’à l’entrée en phase 1 de tests cliniques lors du premier trimestre 2020. Un tel accomplissement n’est dû ni au hasard, ni à quelques prouesses individuelles de chercheurs géniaux mais résulte bien de l’élaboration par Moderna d’une suite d’outils logiciels et algorithmiques digitalisant l’ensemble de la chaine de valeur du développement du médicament (du séquencement de l’ARN Messager jusqu’à sa fabrication en passant par l’étude de sa composition chimique et de ses propriétés géométriques).

L’ARN Messager est donc cette thérapie programmable qui permet de digitaliser, c’est-à-dire de séquencer les fléaux de l’humanité et d’y apporter des solutions innovantes en des temps records.

Moderna, par son approche entièrement digitalisée et ses dix années d’effort sur cette technologie, en est le meilleur représentant. Au-delà du vaccin Covid-19, le pipeline de la société contient différents programmes au stade clinique ou pré- clinique comme les autres vaccins prophylactiques (de type grippe), les vaccins cancers, mais aussi le traitement de certaines maladies rares. Nous sommes convaincus que ce pipeline d’indications traitables à partir de l’ARN Messager va encore croître dans les années futures. Pour accompagner cette croissance, Moderna dispose de capacités de production dans le Massachussets, elles aussi entièrement digitalisées et dirigées par l’ancien Head of Manufacturing de Novartis. La route sera néanmoins longue et contrariée car si l’ARN Messager dispose d’atouts précieux (être une thérapie programmable c’est-à-dire qui se séquence), son potentiel d’utilisation à des fins thérapeutiques reste limité par : 1) la durabilité de son expression (pour que l’ARN Messager donne lieu à un médicament , il faut qu’il génère des protéines, or cette expression peut s’avérer de courte durée) ; 2) la réaction du système immunitaire à l’introduction d’un ARN Messager dans une cellule n’est pas toujours celle qui est souhaitée et les chercheurs travaillent sur ces sujets ; 3) le mode de livraison de la modification génétique produite par l’ARN Messager est le LNP (Lipide Nanoparticules) qui a l’avantage d’une non toxicité (contrairement à d’autres approches) mais la faiblesse d’avoir de moins bonnes facultés de transport du gène transformant que d’autres technologies de transport (comme celles à base virus notamment).

Aucune des sociétés citées ci-dessus ne constitue une recommandation d’investissement.Les performances passées ne préjugent pas des performances futures et ne sont pas constantes dans le temps.



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